La grande illusion
Reconnaissons que le discours de François Hollande a été nourri de belles phrases et de bonnes intentions. Dommage en revanche qu’il n’y ait que très peu d’éléments nouveaux. Peu de surprise en effet sur le maintien du nucléaire avec la seule fermeture de Fessenheim (prévue pour 2016), ou le plan – ambitieux – de rénovation thermique qu’on soupçonnait déjà. Peu de choses en somme qui ne faisaient déjà partie du programme du candidat. Il y a certes eu quelques avancées comme l’annonce de la création de l’Agence Nationale de la biodiversité, ou le rejet de 7 demandes de permis d’extraction de gaz et huiles de schiste. Malheureusement, cette dernière annonce est en trompe l’œil : non, M.Hollande, il n’y a pas que 7 demandes de permis de gaz et huiles de schiste en cours d’instruction, d’annulation ou de recours en France ! La mobilisation citoyenne, soyez en sûrs, continuera jusqu’au dernier permis. Et si c’est, comme le dit le président, les citoyens qui doivent avoir le dernier mot, pourquoi continuer de refuser le référendum sur le nucléaire ?
Car sur ce sujet comme sur d’autres, on sort de ce discours de M Hollande avec la désagréable impression que les grandes lignes de la conférence environnementale sont en réalité déjà fixées. Bonne nouvelle pour les participants qui vont pouvoir rentrer chez eux… Contrairement aux manifestants du « marathon pour la sobriété énergétique » qui manifestaient ce matin devant le Palais d’Iéna et ne pouvaient, eux s’extraire du cordon policier ! Pas un mot d’ailleurs dans le discours du Président sur le projet d’aéroport de Notre Dame des Landes, alors même qu’il annonce une volonté forte de préservation des terres agricoles. Cherchez l’erreur…
Rien, enfin, dans le discours du Président de la République sur le développement du frêt, sur la gestion publique de l’eau ni globalement sur les moyens publics de cette ambitieuse politique affichée ! Comment le gouvernement compte t il mener la transition écologique et parvenir à 60% de réduction des gaz à effet de serre en 2040 en se contentant de « réguler » le marché européen des quotas carbone ou en laissant les choix d’intérêt général aux mains des multinationales de l’énergie vantées ce matin par M Hollande ?
Les principaux moyens évoqués sont confiés au secteur privé à travers la mobilisation de la Banque publique d’investissement alors que c’est ce même marché qui a échoué à développer une filière d’énergies renouvelables fiable.
François Hollande doit aussi clarifier ses annonces en matière de libre-échange et sortir de ses contradictions. Il nous explique qu’il ne faut pas confondre « protectionnisme et protection de la planète », mais reprend à son compte la proposition d’une taxe carbone aux frontières de l’Union européenne. Rappelons que celle-ci est incompatible avec les traités européens qu’il soutient et le dogme libre-échangiste qu’il a accepté au G8 et au G20 en mai dernier !
Tout cela est cohérent avec l’austérité et la ratification du Traité Sarkozy-Merkel. On reste encore et toujours dans la grande illusion et les vieilles recettes de la croissance verte. Non ! Pour réussir la transition écologique, il faut engager une véritable planification écologique, réaliser des investissements publics considérables et développer des services publics incompatibles avec le dogme de la « compétitivité » et l’austérité ! Les questions écologiques, économiques et sociales ne peuvent plus longtemps rester indépendantes l’une de l’autre.
Reste à espérer que participants de la société civile, associations et syndicats invités aux tables rondes puissent faire la jonction. A entendre ce discours d’ouverture, nous craignons que non.