Hommage à Michel Naudy
Michel Naudy a mis fin à ses jours dimanche dernier. Michel a eu plusieurs vies militantes. Il a été successivement, et tout à la fois, communiste, même après être parti du PCF, et profondément républicain, d’esprit libertaire également. Il a été en réalité un résistant au sens premier du terme. Sa carrière de journaliste a d’ailleurs profondément pâti de son engagement sans fard ni calcul. Le communiqué du SNC-CGT que nous reproduisons ci-après, le dit : sa liberté de ton, ses qualités d’investigation, son indépendance vis-à-vis du pouvoir et du monde de l’argent, l’ont conduit à être mis sur la touche par France 3. Il a profondément souffert de ne plus pouvoir exercer ce métier au sein du service public, mais il a sans cesse poursuivi son travail d’enquêtes journalistiques, qu’on pouvait retrouver dans les livres, dont il a été l’auteur.
En tant que responsable du MARS (Mouvement pour une Alternative Républicaine et Sociale), Michel a également été l’un des fondateurs du Parti de Gauche. Nos chemins se sont séparés sans que nous puissions y remédier, ni parfois le comprendre vraiment. Mais l’homme était entier, avec les immenses qualités que cela suppose et le côté tranchant et définitif que cela implique parfois. Nous avons regretté de ne pas avoir poursuivi ce chemin ensemble. Surtout, Michel souffrait. Sans doute trop puisqu’il nous a quittés. Sa voix, son humour, sa culture immense, son tempérament manqueront à beaucoup de monde en Ariège, où il vivait, et allleurs. Le Parti de Gauche lui rend hommage et adresse ses condoléances sincères et fraternelles à ses deux fils Jean-Baptiste et Martin, ainsi qu’à sa famille et ses amis .
Communiqué du SNJ-CGT (Acrimed)
On n’entendra plus la voix teintée d’accent de son Ariège natale ; on ne verra plus la moustache indignée de ses accès de fureur contre les adeptes du consensus mou dans la profession ou fustigeant les dérives de la gauche néo-libérale.
Notre camarade, notre ami, Michel Naudy a mis fin à ses jours d’une balle dans la tête.
Michel faisait honneur au journalisme d’investigation, au journalisme d’analyses et d’éditos, enfonçant les clous là où ça faisait mal.
Le lutteur a décidé d’en finir.
Sa dernière apparition publique aura été pour dénoncer les « nouveaux chiens de garde » dans le film éponyme.
Les luttes, il les menait depuis sa jeunesse à l’Union des étudiants communistes.
Il les a poursuivies durant sa carrière de journaliste, troquant les assemblées générales pour la plume, comme d’autres [1] avant lui avaient « remplacé la mitraillette de la Résistance par le stylo ».
D’abord à L’Humanité dont il eut la responsabilité du service politique, fondant parallèlement Politis, puis après 1981 à France 3, où il gravira les échelons pour devenir rédacteur en chef de la rédaction nationale et éditorialiste.
Durant toutes ces années, malgré sa grande honnêteté intellectuelle, sa rigueur, quelques-uns en interne et en externe, ne lui pardonneront jamais ses engagements de journaliste-citoyen.
Il sera débarqué de son poste, trouvera refuge à France 3 Île-de-France avant qu’une nouvelle fois son magazine « Droit de regard » ne soit censuré en mai 1995, pour avoir exprimé une critique sur la couverture par France 2 du second tour de l’élection présidentielle. C’en était trop, Michel démissionnait de ses responsabilités.
Depuis, voilà plus de quinze ans, il attendait que la direction de France 3, puis de France Télévisions, honore son contrat de travail.
Il avait postulé à différents postes de moindre responsabilité en commission paritaire. La dernière fois pour occuper le poste vacant de chef du service politique, qu’il devait une nouvelle fois se voir refuser au prétexte, selon un cadre de la rédaction nationale, qu’il « n’y avait pas besoin d’un Brétécher à la rédaction » !
Hommage du vice à la vertu.
Les nombreuses interpellations de notre syndicat pour que les directions successives lui donnent du travail s’étaient toutes avérées infructueuses. Aujourd’hui certains devraient avoir honte de se regarder dans une glace….
Adieu Michel le monde du journalisme est en deuil.
Paris, le 3 décembre 2012