Notre parti ne sera plus le même après la crise du Covid-19. Nous savons que nos luttes devront s’intensifier pour répondre à la violence de cette crise et ces luttes porteront le nom de Roumiana Calfuquir Galileeva, notre camarade qui nous a quitté ce lundi 4 mai.
L’histoire de Roumiana et de sa famille est profondément liée à la résistance internationale si chère à notre parti, des pays de l’Est à l’Amérique Latine avant d’arriver en France. Née en Bulgarie dans les années 50, elle rencontre sur les bancs de la faculté d’économie de Bucarest (Roumanie) Victor Calfuquir, militant exilé du MIR chilien (mouvement de la gauche révolutionnaire). Elle embrassera sa lutte et le suivra à Cuba où Victor et d’autres militants chiliens travaillèrent pendant plusieurs années entre la fin des années 70 et le début des années 80 à la production d’analyses politiques et d’articles de presse sur la dictature au Chili.
Pour Roumiana c’est une nouvelle langue et une nouvelle culture à apprendre sur le tas. Les camarades qui l’ont connue sur place se rappellent de sa grande solidarité, même avec les personnes qu’elle ne connaissait pas. C’est à la Havane que naîtra Claudio Calfuquir, actuellement membre de notre Secrétariat exécutif national.
Mais il a fallu repartir et s’intégrer à nouveau, cette fois en France. La famille obtient l’asile politique et s’installe à Paris mais les conditions économiques sont difficiles. Victor et Roumiana enchaînent les petits boulots. Avec d’autres camarades chiliens déjà organisés sur place, ils collent des affiches pour les galeries d’art sur les murs de France, avant de monter une entreprise de contrôle technique. Encore une langue à apprendre et de nouveaux repères à construire. Au bout de quelques années Julian-Nicolas Calfuquir naît à Montreuil, lui aussi est membre de notre SEN.
Au cours de ces décennies, la solidarité entre les latino-américains à Paris a été un élément central de leur vie, à laquelle ils ont contribué autant qu’ils ont réussi grâce à ce réseau à faire leur place dans la société française des années 80-90. Membres de la première heure du Parti de Gauche, les Calfuquir ont représenté notre parti dans de nombreuses luttes de solidarités latino-américaines contre Pinochet, en soutien à la révolution cubaine, bolivarienne, à la démocratie en Équateur, contre le coup d’État au Brésil puis en Bolivie. De la fin des régimes militaires à l’essor des démocraties progressistes jusqu’au retour de l’oppression néolibérale. Ils se sont aussi investis dans les luttes locales à Montreuil où ils vivent depuis de nombreuses années.
Il y a un mois, Roumiana et Victor ont été hospitalisés en réanimation des suites d’une contamination au Covid-19, tous deux dans un état grave. Roumiana ne s’en est malheureusement pas sortie. La santé de Victor reste fragile mais s’améliore et nous lui transmettons chaleureusement tous nos vœux de rétablissement ainsi que notre plus grand soutien à leurs deux fils et proches.
Dans les mouvements sociaux d’Amérique Latine, lorsqu’une personne meurt, ses camarades entonnent un cri de résistance. A son nom prononcé ils répondent à trois reprises Presente ! Presente ! Presente ! Car si le corps n’est plus, c’est la flamme de toute son histoire de lutte qui doit rester vivante et continuer de rayonner dans les cœurs de ceux qui luttent pour les mêmes idéaux.
Et c’est en nous inspirant des rituels de son continent d’adoption que nous crions haut et fort : Roumiana Calfuquir Galileeva, Présente ! Présente ! Présente !
Les barrières du confinement ne nous laisseront pas l’embrasser une dernières fois, mais les luttes de demain porteront son nom. Elle sera l’étendard de notre inlassable combat pour que demain ait le goût de ses espoirs et le son de ses rires.