Idriss Déby Itno est mort à 68 ans des suites de blessures reçues alors qu’il commandait son armée dans des combats contre des rebelles dans le nord du pays ce week-end. Ce décès survient au lendemain de la proclamation par la CENI, de résultats provisoires qui plébiscitaient le président sortant dès le premier tour avec 79,32% des voix, lui ouvrant ainsi la voie à un sixième mandat.
Idriss Déby Itno, auto-promu au rang de maréchal en août dernier, s’est maintenu au pouvoir par des élections non-démocratiques pendant 30 ans, y compris en faisant assassiner en 2008 le leader de l’opposition Ibni Oumar Mahamat Saleh. Cette année, la présidentielle au processus électoral encore contesté en amont, a été de nouveau boycottée par les principaux partis d’opposition.
Idriss Déby Itno a réprimé la liberté de la presse, brimé l’opposition, privilégié de façon éhontée son ethnie zaghawa et interdit toutes les manifestations dans la rue. Il a, de cette manière, provoqué la création des rébellions, composées d’hommes qui considéraient que les processus électoraux n’étaient pas crédibles au Tchad.
Après la mort de son père, le 20 avril, le général quatre étoiles Mahamat Idriss Déby, alias Mahamat Kaka, 37 ans, jusqu’alors chef de la redoutable Garde présidentielle a dissous gouvernement et Assemblée nationale et juré que de nouvelles institutions verraient le jour après des élections « libres et démocratiques » dans un an et demi. Il a suspendu la constitution de 2018 et installé au pouvoir un Conseil militaire de transition composé de 15 officiers de haut rang. Or la constitution dans son article 81 prévoyait que le pouvoir devait revenir au « Président de l’Assemblée Nationale et, en cas d’empêchement de ce dernier, par le 1er Vice-président ». Il s’agit donc d’un coup d’Etat militaire qui fait craindre une fausse transition aboutissant à un processus électoral non démocratique à son issue. Une succession monarchique comme au Togo en 2005 ou au Gabon en 2009 est possible.
L’Élysée a publié un communiqué qui fait honteusement honneur au despote: « Le Tchad perd un grand soldat et un Président qui a œuvré sans relâche pour la sécurité du pays et la stabilité de la région durant trois décennies, indique la présidence. La France perd un ami courageux. […]Aucune condamnation donc !
Le Drian, grand ami de Déby, a appelé à une transition militaire d’une « durée limitée » qui conduise à un « gouvernement civil et inclusif ». La ministre des Armées Florence Parly a de son côté affirmé que la France « perd un allié essentiel dans la lutte contre le terrorisme au Sahel » tant il est vrai que le régime Déby est un contributeur de poids en soldats et armements dans ce conflit.
Une France néocoloniale reconnaissante qui a par deux fois au moins « sauvé » le dictateur (février 2008 et février 2019) ; une France intéressée qui pour garder à son armée un terrain d’entraînement particulièrement favorable et une base arrière pour les opérations, a fermé les yeux sur la dérive despotique du régime et l’a laissé déstabiliser la République Centrafricaine.
Le Parti de Gauche condamne le coup d’Etat militaire du 20 avril et désapprouve fermement d’une part le communiqué de l’Elysée à ce sujet, d’autre part le choix de Macron de se rendre aux obsèques du despote.
Le Parti de Gauche en appelle au retour à l’ordre constitutionnel et à l’organisation d’élections libres dans le délai prévu par la constitution tchadienne (90 jours maximum).
Le Parti de Gauche demande au gouvernement français et au Service européen pour l’action extérieure d’employer leurs moyens diplomatiques pour garantir la sécurité des militants des partis d’opposition et de la société civile et pour aider à la mise en œuvre d’une véritable transition inclusive vers la démocratie au Tchad.